Les 7 fontaines du village

– Récit de Rémy Roche –

Les fontaines de notre village vous invitent à un voyage dans le temps.

Nos fontaines… Je crois qu’elles conservent dans leurs pierres l’empreinte de toutes les personnes qui les ont utilisées et admirées. Le murmure de l’eau le raconte à qui prend la peine de l’écouter.

Ce voyage commence il y a plus de dix millions d’années. Ici se trouvait une mer tropicale,  chaude et peu profonde dans laquelle se déposaient végétaux, fragments de coquillages et de poissons. Au fil du temps, une épaisseur de plusieurs mètres de ce calcaire perméable s’est formée pour constituer aujourd’hui les hauteurs de Cabrières.

L’eau de trois de nos fontaines surgit directement de cette couche perméable, elle-même supportée par une couche imperméable de couleur plus claire. Bien que provenant du même cheminement, la composition chimique de l’eau est différente pour  chacune de ces fontaines comme le révèlent les analyses minéralogiques réalisées, et les diverses réactions observées lors de fortes intempéries.

L’eau qui alimente les fontaines restantes (au nombre de quatre) est issue d’autres couches sédimentaires, et la mise en oeuvre d’ouvrages importants ont parfois été nécessaires pour en effectuer le captage.

En suivant le fil de l’eau et de son histoire, nous découvrons la Petite Fontaine qui fut la première créée et aménagée en abreuvoir à l’époque.

Une archive municipale datant de l’an 1700 fait état d’une demande d’autorisation afin d’utiliser les pierres du mur de l’ancien cimetière pour construire la voûte de cette fontaine.

Ce qui pourrait laisser supposer pour beaucoup que l’âme des anciens veillerait sur elle.

Pour information, elle a été restaurée par l’entreprise BOCCOZ en 2016 à la demande de la mairie car elle menaçait de tomber en ruine.

En poursuivant notre promenade, et après avoir longé des habitats troglodytes, le chemin nous conduit à la fontaine de la Gaye. Celle-ci est surmontée d’une longue entaille dans la paroi appelée larmier, destinée à canaliser les suintements.

Continuons notre périple pour arriver sur la place de la Mairie.

La Fontaine de la place édifiée face à la Mairie est la plus récente. Ce chantier d’importance réalisé en 1874 a nécessité pour sa construction une main d’oeuvre considérable, autant pour l’ouvrage que pour la captation de l’eau.

Un peu plus loin, au niveau du pont, on peut également apercevoir une autre fontaine (sans nom).

Basculons maintenant sur l’autre versant du vallon du Règue, côté rocher du château, ce grand vaisseau de pierre, où nous allons découvrir trois autres fontaines.

Tout d’abord la fontaine dite du lavoir des escaliers qui surgit entre deux couches de safre, et dont on pourrait croire à la proximité de sa source tant son débit est élevé. Pourtant, lors de fortes pluies, ce n’est qu’au bout de quelques semaines que l’on peut remarquer une altération de la couleur et de la substance de l’eau rejetée  ce qui démontre que la provenance de l’eau est lointaine et profonde.

Bien que parfois réduite à un filet d’eau du fait de la répétition des années de sécheresse, et de mémoire de villageois, elle n’a jamais tari. A l’exception de l’hiver 2017, le plus sec en Provence depuis celui de 1959.

L’eau qui se déverse du lavoir est dirigée par bifurcation soit vers un proche bassin, soit dans la rigole des escaliers en direction des jardins du côté sud-est du village.

Elle a également la particularité de partager ses eaux avec une fontaine annexe, la Fontaine Longue.

Enfin, pour terminer notre circuit des fontaines de Cabrières d’Aigues, nous découvrons la septième et dernière d’entre elles qui se nomme la Turinette. Elle à pour caractéristique d’être souterraine, et de rejeter son eau sous un passage dallé surplombant un bassin.

Nous avons suivi le fil de l’eau et de l’histoire également, mais une question se pose… L’eau de nos fontaines est-elle potable ?

Si vous prenez le temps de regarder attentivement la mousse des parois des bacs de toutes ces fontaines, vous apercevrez les discrets habitants de ces lieux, de minuscules sortes de crevettes d’un ou deux millimètre se propulsant d’une brindille  à l’autre, les GAMARES. Ces petites bêtes ne peuvent vivre que dans une eau très pure, la moindre pollution leur est fatale.

Cet élément de réponse, ce sont nos anciens qui nous l’ont apporté, c’était important pour eux…. et ça l’est toujours pour nous aujourd’hui !

Rémy Roche